Retour sur la planète Terre


Il s’agit littéralement de ça, en effet, tant j’ai eu la sensation, ces derniers jours, d’être transportée dans une autre dimension ou à une autre époque. Ou les deux en même temps, peut-être ! J’aimerais bien partager tout de suite avec vous quelques photos, histoire de vous faire comprendre ce que je veux dire de manière plus concrète mais il se trouve que j’ai oublié mon câble à Lima, hihi !... Il faudra donc attendre un peu pour les témoignages visuels et vous contenter de mon récit pour l’instant !...

LUNDI. Avion de Lima à Cusco. Arrivée au milieu des montagnes dans une petite ville incroyablement belle, en plus d’être historiquement l’ancienne capitale de l’empire inca. On pose les sacs à l’hôtel, une adorable maison coloniale où toutes les chambres donnent sur le patio intérieur, d’une tranquillité dont je n’avais plus l’habitude !... Déballage des sacs et hop, en route vers l’aventure ! Enfin, en l’occurrence, en route pour un premier tour de la ville, en commençant par le site arquéologique de Sacsaywamán, immenses ruines d’importance religieuse et militaire surplombant la ville et représentant la « tête du puma » puisque l’ancienne ville de Cusco avait été construite en forme de puma. Bon, je ne l’invente pas, c’est la guide qui me l’a expliqué, évidemment ! Mais déjà, ça m’a mise dans l’ambiance...

De là, on a poussé à Q’enqo, des petites ruines en forme de zigzag, pleines de niches, de grottes,... Là, la guide s’est lancée dans une explication des sacrifices et autres momifications qui m’a rappelé mes cours d’histoire de 6e. J’écoute donc, fascinée, les histoires de viscères et autres joyeusetés du même genre.

Sans transition, on va visiter le complexe de Qorikancha : les ruines incas sont les fondements de l’église coloniale et du couvent construits par-dessus. Ce qui reste du temple inca permet de mieux visualiser et comprendre l’extraordinaire ingénierie des constructions.


Puis, visite de la cathédrale, un beau monument colonial dont l’intérieur ferait passer le baroque européen le plus déjanté pour de la gnognotte. Waouh, les autels en or et en argent !... Malheureusement, je ne pourrai pas appuyer mes propos par des photos car il est interdit d’en prendre dans les églises afin de protéger les (très !) nombreuses peintures accrochées tout le long des murs. Pour finir, un petit tour dans la crypte où est conservée une partie des manuscrits de l’Inca Garcilaso de la Vega. Et là, d’un coup, flash-back de mes cours de fac d’espagnol ! Didjou, j’aurais pas cru qu’ils me serviraient un jour, ceux-là ! Comme quoi, il ne faut jurer de rien !...

Et pour finir la journée, petite balade dans la ville, autour de la Plaza de Armas.

MARDI. Lever aux aurores pour partir à la découverte de la « Valle Sur ». Premier arrêt à Wero, improbable village perdu au milieu de nulle part et abritant un non moins improbable musée des pierres sacrées. Ledit musée est caché au fond d’un patio et est constitué d’une pièce, mal éclairée et poussiéreuse. Passés la surprise et l’amusement du début face à un endroit aussi surréaliste, j’avoue que j’ai été complètement fascinée de découvrir les systèmes de « hiéroglyphes » mis en place par les civilisations pré-incas.

Deuxième arrêt à la « chapelle Sixtine d’Amérique Latine », soit l’église de San Pedro de Andahuyalillas. Cette pittoresque église est assez simple d’extérieur mais c’est son intérieur qui surprend : plein d’ornements rococos complètement insolites et un curieux toit de style andin barroque (si, si, ça existe).

Troisième arrêt pour visiter les fabriques de tuiles de Piñipampa. Le paysage est recouvert de petites cheminées qui sont en fait les cheminées des fours traditionnels servant à cuire les tuiles. Bon, là, petite giclée de réalité... Les conditions de travail sont plus que difficiles. Un monsieur nous explique gentiment et en souriant que les fours sont allumés 12 heures par jour, soit leur temps de travail quotidien. De là, il nous envoie voir un jeune adolescent qui travaille à préparer la « pâte » de la tuile. Quand la guide lui demande depuis quand il fait ça, il la regarde surpris et lui répond « Depuis que je suis tout petit ». Au loin, trois gamins jouent au milieu des débris et établissent des tours pour monter sur un vieux vélo à moitié rouillé pendant qu’une fillette aux vêtements troués les regarde, la mine boudeuse. Ouais, au cas où on aurait eu des doutes, le Pérou, ce n’est pas que Machu Picchu et ses hordes de touristes...

Dans le même esprit, visite à Oropesa des boulangeries familiales traditionnelles, avec leurs grands fours impressionnants. Au-dessus de la porte d’entrée, un crâne trône. Est-ce quelqu’un de la famille ? Non, nous répond une dame, c’est tout simplement l’ancien propriétaire mais, en effet, il est de coutume de placer là le crâne d’un ancien de la famille pour porter chance.

Dernière étape du tour : le site de Pikillaqta, seules ruines pré-incas de la zone. Je dois dire que le site est impressionnant : il s’agit d’une véritable ville, dont les avenues étroites suivent un tracé géométrique d’une précision ahurissante. Le site est absolument immense et les ruines suffisamment bien conservées pour qu’on imagine sans mal à quoi ressemblait la ville.

Retour à Cusco. Je vais faire un tour au musée inca, où je vois effectivement les petites statuettes trouvées à Pikillaqta et dont la guide nous a parlé. Apparemment, il y en a 120. Je me dis que sur 120, personne ne remarquera s’il en manque une... Mais le gardien n’est pas très loin alors je n’ose pas tenter le coup ! Petit tour aussi dans le quartier de San Blas, superbe. La ville est toute en montées, escaliers, points de vue,... J'adore !

MERCREDI. De nouveau, lever aux aurores, cette fois pour aller découvrir « el Valle Sagrado », la vallée sacrée. Autant dire que les choses vont crescendo... La première étape est Pisaq. On commence par la citadelle inca, érigée tout en haut d’une colline et surplombant le village. Le paysage est magnifique et les touristes quasiment absents. Un des éléments marquants est la présence des terrasses agricoles qui forment de jolies courbes sur le versant de la colline. Dans la partie supérieure des terrasses, se trouve le centre cérémonial. En face, on voit des sortes de trous dans le flanc de la montagne : il s’agit de tombes. Des tombes de gens du peuple, évidemment, nous précise la guide. Je me dis qu’ils ont quand même une bien meilleure vue que la majorité des gens enterrés dans nos cimetières !

En redescendant, on s’arrête au marché de Pisaq. Alors, là, j’avoue que j’ai eu du mal à continuer à dire calmement et avec le sourire « No, gracias » à tous les gens qui me harcelaient. Putain, jamais je n’ai autant regretté d’avoir la peau si blanche et les yeux bleus !... Ceci dit, ils ont quand même de très beaux bijoux en argent, ainsi que d’impressionnants élevages de cochons d’Inde. Oui, parce qu’ici, on mange le cochon d’Inde. Alors, pour les curieux qui se posent la question, non je n’ai pas testé, quoique la curiosité me tiraille ! En revanche, j’ai goûté le lama et c’est dé-li-cieux !

Je ferme cette parenthèse gastronomique pour passer à la deuxième grande étape de la journée : Ollantaytambo. Les ruines incas y sont tout simplement spectaculaires. En plus des impressionnantes terrasses et du centre cérémonial, on peut voir, sur les montagnes en face, le visage du dieu Wiracocha taillé dans la roche, ainsi qu’un profil inca, situé à une hauteur vertigineuse. Dans le centre cérémonial, les pierres sont d’une taille à peine croyable. Sans compter qu’évidemment, les incas avaient la manie de toujours se construire des trucs en hauteur, dans des lieux inaccessibles. De là à dire que les Romains se la coulaient douce avec leur Colysée, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas parce que j’aime trop Rome et que le Colysée m’émeut toujours autant à chaque fois que je le vois, en vrai ou en photo !

Ensuite, petit tour dans le village d’Ollanta. De nouveau, cette sensation de dualité que j’éprouve presque depuis le premier jour de mon arrivée. Dès qu’on sort des ruines et qu’on dépasse le marché à souvenirs judicieusement placé à la porte de sortie des ruines (tiens donc...), il y a deux espaces : la place principale du village, bordée de cafés et d’auberges pour les touristes et le village. Sur les recommandations de la guide, je quitte vite fait la place et prend une des petites rues qui en part. Impression de pénétrer dans un autre univers, un univers fait de rues étroites, bordées de minuscules canaux au-dessus desquels sont installées des planches pour accéder aux maisons en plus ou moins bon état. Ici, une dame en costume traditionnel (pas déguisée, elle, contrairement à la majorité de celles de Cusco) s’affaire au milieu des débris dans sa cour. Là, un homme pousse un chariot brinquebalant plein à craquer de diverses provisions. Des maisons délabrées avec du linge tendu aux fenêtres. Et partout, une impression de tranquillité, renforcée par les murmures omniprésents de l’eau.

Je suis presque en état de choc quand je me dirige vers la gare et que je vois tous ces touristes amassés. J’avais presque oublié qu’ils étaient là ! Pourtant, comment oublier qu’on est tous censé prendre le train qui va nous conduire à Machu Picchu ?...

JEUDI. Alors, là, c’est pas lever à l’aube, c’est carrément en pleine nuit ! Cinq heures du matin, le soleil n’est pas encore levé mais à la clarté de la lune, je découvre le paysage que je n’avais pas pu voir la veille au soir : des montagnes majestueuses cachées dans le brouillard. Six heures tapantes, je suis dans le bus qui fait l’ascension jusqu’à Machu Picchu. Emotifs ou victimes de vertige s’abstenir. Mais cela dit, les paysages sont littéralement à couper le souffle. Vous savez, ces montagnes verdoyantes qui se dressent à pic et dont le sommet est souvent mystérieusement caché dans les nuages ? On a tous vu ces images, en photos, dans des documentaires. Eh bien laissez-moi vous dire que de voir ça en vrai, ça a de quoi vous provoquer quelques palpitations...

Arrivée à Machu Picchu... dans la brume ! Mais quand je dis dans la brume, je ne veux pas dire « Oh flûte, y’a un peu de brouillard, ça va pas faire bien pour les photos ». Non, non, non... Je veux dire que, alors que le guide s’évertue à nous expliquer le pourquoi du comment des terrasses et à insister sur le fait que le site est tellement vertigineux que personne ne pouvait y accéder par le bas, je regarde avec perplexité l’immensité blanche devant moi... Carole, ma soeur Carole, ne vois-tu rien venir ? Je ne vois que la brume qui brumoie et, euh... ben... Juste la brume qui brumoie, en fait ! Bon, j’ai alors secrètement invoqué les bonnes grâces de Pachamama et tenté de faire un gros effort d’imagination pour illustrer les propos du guide. Mais sérieusement, on distinguait à peine les ruines devant nous !...

Heureusement, Pachamama m’a entendue et la brume s’est dissipée dans le courant de la matinée. Pour laisser place à un soleil qui cogne bien comme il faut. Alerte au jambon braisé en perspective... Entre deux ébahissements, je me tartine quand même consciencieusement de crème solaire mais, à ma grande joie, je constate que je ne suis pas la seule touriste à friser le risque de transformation en jambon braisé !

Et là, c’est juste incroyable... La citadelle, le temple du soleil, Intihuatana et le temple des trois fenêtres... C’est... C’est... C’est impossible à décrire ! Comme quelque chose dont on a rêvé depuis si longtemps qu’on ne sait plus quoi dire une fois qu’on l’a ! Le site est magique, mystérieux, spectaculaire et envoûtant. Même les hordes de touristes n’arrivent pas à gâcher mon plaisir. J’ai l’impression d’être transportée à une autre époque. Je bois littéralement le paysage, ne sachant plus où donner de la tête... Toutes les photos que j’ai prises ne réussiront jamais à traduire cette expérience inimaginable, à rendre palpable cette émotion intemporelle...

Je repars du site les yeux brillants, avec l’impression de flotter. Durant le trajet en bus, je couve de nouveau du regard ces montagnes mystérieuses et légendaires. Puis, pour parfaire cette expérience, retour à Ollanta en train. La veille, je n’avais pas pu profiter du paysage puisqu’il faisait déjà nuit. Là, je me régale ! La voie ferrée longe le fleuve Urubamba et ses remous impressionnants. Le fleuve s’est tracé un chemin entre les montagnes escarpées et la forêt luxuriante. Ce n'est pas le fin fond de l'Amazonie mais je ne peux m'empêcher de penser malgré tout au livre de Vargas Llosa que je viens de terminer !

Quand j’arrive à Ollanta, on fait le transfert en bus jusqu’à Cusco. Il fait nuit noire dehors. De quoi admirer un ciel étoilé sans nuages, pour le coup. Retour à Cusco, la tête encore plongée dans un tourbillon d’images...

La suite des aventures de Carolita au Pérou et les photos très prochainement !...

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